C’est en cette date symbolique du 8 mars, journée internationale des droits de la femme que les Américaines ont engagé une action en justice pour discrimination sexuelle.
Alors qu’une première plainte avait été déposée en 2016. Frustrées par l’inactivité de la Fédération Américaine de Football (USSF) après presque trois ans, les joueuses US reprennent la lutte à 3 mois de défendre leur titre de championnes du monde.
Vingt-huit joueuses de la sélection américaine, ont intensifié de façon significative leur longue lutte contre leur Fédération de Football (USSF) sur l’équité salariale et les conditions de travail. Dans un communiqué publié par les joueuses, on peut lire «discrimination de genre institutionnalisée» qui, selon elles, perdure depuis des années. Un consensus partagé par 28 joueuses de toutes générations et qui pointe du doigt les différences de traitement entre la sélection masculine et la sélection féminine. Si avec 3 coupes du monde, les américaines détiennent le record au football féminin, elles ne semblent par être considérées outre mesure par leur Fédération. Les joueuses impliquées désirent, à l’issue de cette lutte, améliorer leurs conditions d’entraînement, de déplacement, les soins médicaux qu’elles reçoivent lors des rassemblements et en premier lieu leur salaire. La plainte déposée à l’encontre de l’USSF devant le tribunal de district des États-Unis à Los Angeles met en exergue la violation de la loi sur l’égalité de rémunération et de l’article VII des Droits civils.
L’USSF l’employeur des joueuses internationales est également la structure qui régit le sport en Amérique. Cet élan de révolte est ainsi devenu le symbole de la lutte d’autres disciplines féminines américaines telles que le rugby, le basket-ball, le hockey ou même du football canadien. Partageant les mêmes envies de changements, les athlètes issues de ces différents sports ont sollicité l’aide des footballeuses et de leur syndicat pour tenter d’aboutir à des résultats similaires.
Les footballeuses US mettent en avant le fait qu’elles sont tenues de jouer plus de matches que l’équipe masculine, qu’elles en gagnent plus et sont plus titrées, tout en recevant un salaire moindre de la part de la Fédération. Alors que pendant des décennies l’investissement de l’USSF a permis à la sélection féminine de football de devenir la plus titrée au monde côté féminin (trois coupes du monde, quatre médailles d’Or Olympique, sept titres CONCACAF), les joueuses se sont toujours plaint de la disparité de traitements financier et de logistique comparé à leurs homologues masculins. En 2000, quelques mois après leur titre mondial remporté sur leurs terres mais mécontentes du montant de leur salaire, la génération de joueuses US de l’époque avait boycotté un tournoi en Australie. Un avant-goût de la fronde qui s’est accentuée en 2015 à l’aube de la Coupe du Monde au Canada. Celles-ci n’avaient pas hésité à affronter la FIFA contre le déroulement de la compétition sur des pelouses synthétiques, les primes de matchs trop basses ou encore des normes d’arbitrage litigieuses.
Un combat qui grâce au pouvoir des réseaux sociaux a permis de bousculer la FIFA et de faire accélérer les choses. La FIFA a en effet doublé le montant des primes pour la Coupe du monde féminine 2019 et exit les terrains synthétiques. L’USSF a également amélioré les inégalités en termes de transports, l’argent des repas et l’hébergement.
Les Américaines ont ainsi gagné en respect, sont devenues des exemples à suivre et c’est comme cela qu’un élan de révolte mondiale s’est répandu : l’Équipe nationale espagnole a réclamé l’éviction de son entraîneur après la dernière Coupe du Monde, plusieurs Brésiliennes ont quitté la sélection pour protester contre l’éviction de la sectionneure Émily Lima en faveur d’un homme. Des joueuses Argentines et de Colombie ont annoncé publiquement qu’elles étaient maltraitées et mal payées, et les Norvégiennes ont réclamé – et gagné – l’égalité salariale ce qui fut une première mondiale tous sports féminins confondus. Des actes forts qui motivent davantage les joueuses américaines à ne pas lâcher leur lutte.
« Nous avons conscience que c’est de notre responsabilité, non seulement pour nous mais également pour les générations futures et les joueuses et femmes du monde entier. Nous devons nous sentir comme des alliées, nous défendre et lutter pour ce en quoi nous croyons, nous méritons et pour ce que nous pensons avoir gagné, a déclaré Megan Rapinoe »
Chaque sélection US a sa propre convention collective négociée avec l’USSF, et l’une des différences majeures est la structure salariale : les hommes reçoivent des bonus de match plus élevés lorsqu’ils jouent pour les États-Unis, mais ne sont payés uniquement lorsqu’ils jouent, tandis que les femmes reçoivent une garantie de salaires mensuel complétés par des bonus de match en sélection en fonction du résultat, mais plus petits.
Les primes de plusieurs millions de dollars que les équipes reçoivent pour leur participation à la Coupe du monde constituent l’une des différences les plus importantes en matière de rémunération. Ces primes 400 millions de dollars pour 32 équipes masculines contre 30 millions de dollars pour 24 équipes féminines sont déterminées par la FIFA et non la Fédération Américaine de Football.
Pour obtenir gain de cause, les joueuses devront prouver non seulement que les féminines et les masculins effectuent le même travail, mais également surmonter les questions concernant les accords de la convention collective négociés en 2017. Selon la loi aucun parti ne peut remettre en question une convention collective entérinée avant son expiration, soit dans ce cas précis à la fin de 2021.
Cependant, pour les experts en discrimination fondée sur le sexisme et les affaires relevant de l’article IX, l’argument que les joueuses avancent est familier.
« Ce sont les mêmes types d’arguments et de revendications que nous voyons toujours à tous les niveaux d’éducation des femmes et des filles, de la maternelle à la fac. C’est malheureusement une continuation triste de la façon dont les femmes et les filles sportives sont traitées aux États-Unis. » a déclaré Neena Chaudhry, conseillère générale du National Women’s Law Center de Washington.